Samia Naïm (traduction de l’arabe yéménite et présentation de)
Hayîm Habshûsh, Yémen
Guider un rabbin français, spécialiste de l’épigraphie, à la recherche d’inscriptions anciennes à travers le Yémen : telle est l’aventure vécue en 1870 par Hayîm Habshûsh, chaudronnier juif de Sanaa. En “domestique” impertinent, il relate ici avec verve les multiples péripéties de ce voyage.
[Extrait]Je me rendis aux ruines, dans l’espoir d’y trouver des inscriptions. Il y en avait suffisamment et je les relevai. Trois ou quatre heures plus tard, je découvris une curieuse pierre allongée, couverte d’inscriptions. Je m’assis au pied du pan de mur qui portait cette pierre et me mis à l’œuvre. J’étais totalement absorbé par mon travail lorsque j’entendis un Bédoin qui me cherchait. Il criait : « Le Juif ! Le Juif ! » Il se trouvait en face de moi mais il ne s’en était pas aperçu. Je dissimulai mon cahier et mon crayon dans le creux de mon aisselle, puis je me redressai et dis : « Que me veux-tu ? » « Que fais-tu ici ? » dit-il. « Je ne fais que dormir », répondis-je. « Allez, viens, reprit-il. Les tribus ont attaché ton compagnon, ils veulent le tuer. Nous te cherchons depuis longtemps ! » Je regardai de loin la porte de la citadelle où s’étaient réunis plusieurs hommes de tribus, et je vis qu’ils avaient capturé mon maître et saisi son cahier. Je craignis aussitôt pour les copies que j’avais sur moi, et je me retournai comme si je voulais faire mes besoins. Puis je fis semblant d’être à la recherche de quelques pierres pour m’essuyer, afin de pouvoir cacher mes copies. Je trouvai l’endroit propice et les dissimulai entre deux pierres.
NAÏM Samia, 1995, (traduction de l’arabe yéménite et présentation de) Hayîm Habshûsh, Yémen, Arles, Actes Sud (Terres d’aventure), 210 p.
Publié en septembre 1995 (réédité en 1998)