Ecole de Lahlap (Motalava)

RESEARCH AT THE LACITO

OPERATIONS AND SEMINARS

Jeux de langage (2018-2024)

Séminaire de recherche en anthropologie linguistique
et séminaire doctoral (Lacito/Inalco)

validable par les étudiants inscrits
à l’ED 265 (Inalco) ou à l’ED 622 (Paris 3)

Under the supervision of Isabelle Leblic, of Bertrand Masquelier and Urmila Nair

L’expression « jeux de langage » rappelle que tout usage du langage est d’emblée inscrit dans une situation sociale et les rapports sociaux qui la définissent. Une première hypothèse de recherche est qu’un « jeu de langage » opère selon des règles formelles publiques ; leur description permet de montrer comment émerge l’intelligibilité (le sens) d’une situation pour ses participants : du point de vue des rôles qu’ils y jouent ou des positions qu’ils y occupent, grâce à la médiation non seulement des formes langagières qui circulent (en situation) mais aussi d’un ensemble de pratiques communicationnelles (non-discursives) générées en situation. Une seconde hypothèse est que ces « jeux de langage », au sein d’une société donnée ou d’une culture, sont multiples. Ce fait invite à les comparer en interne, comme à les comparer avec les répertoires de pratiques d’autres communautés, voisines ou éloignées. Cette entrée dans la description des usages langagiers et des formes de vie sociales qui leur sont liées permet enfin, de questionner leurs conditions (langagières et sociales) de félicité, comme la pertinence des typologies classiques qui sont proposées, par différents modèles, pour rendre compte de la parole en acte. Les domaines d’enquête pertinents pour un tel projet sont ouverts ; ils peuvent puiser dans plusieurs des thématiques de la recherche en anthropologie ethnographique ; voir, par exemple, quelques pistes dans une liste ouverte :
– Pratiques rituelles et paroles en situation.
– L’énonciation de la parenté et les pratiques génératives du lien social.
– Les interdits langagiers et les interdits de l’échange social.
– L’énonciation métaphorique ou les ruses de la parole en acte.
– etc.

Programme 2023-2024 │ CRYPTOTYPES : ÉPISTEMOLOGIE ET ETHIQUE DANS L’ETUDE DU FAIT LINGUISTIQUE TOTAL

Voici l’annonce du programme du séminaire (présentation en version PDF) et de la journée d’étude portant sur les “Cryptotypes : Epistémologie et Ethique dans l’Etude du Fait linguistique total“, et du groupe de lecture “Silverstein 2023” focalisant sur l’ouvrage “Language in Culture” (2023, Cambridge University Press).
Ce programme est sous la responsabilité d’Urmila Nair et de Félix Danos (ICAR)
Ces trois événements s’inscriront dans le cadre du séminaire en anthropologie linguistique, “Jeux de Langage“, du Lacito.
 
Le but est de franchir l’étape suivante du dialogue transatlantique entre les différentes versions de l’anthropologie linguistique, afin d’explorer des chemins vers une anthropologie du langage.
 
Le séminaire et le groupe de lecture auront lieu en ligne le mardi de 16h à 18h/18h30 de septembre 2023 à mai 2024.

 

Les discussions du séminaire seront en français sauf indication contraire.
Celles du groupe de lecture seront bilingues, mais principalement en anglais, car le livre n’a pas encore été traduit.

 

Seminar programs

 

  • 26 septembre 2023

Intervenor : Urmila Nair (Lacito)

Discussing : Valentina Vapnarsky (CNRS, EPHE, Lesc)

Theme : “Beyond the Secret (gsang ba): The Performativity of Citation in an Exile Tibetan Buddhist Ritual”

Abstract :

This article focuses on the Nechung kang-so (bskang gso), a ritual performed at Nechung monastery in exile, and deemed secret (gsang ba) by the monks. In my interactions with the monks, this secret presented itself as an unremitting series of contradictions and conundrums. I attempt here to portray and understand them. I posit that the secret invoked an implicit “cultural concept” (Silverstein 2004), namely, the kang-so’s transmissibility. For the kang-so’s transmission within the monastery involved a specific semiotics of authorization, bound up in a karmic ethic. To reveal the secret to me was to extricate the esoteric ritual from that traditional “social organization of interdiscursivity,” and the ethic shaping it (Gal 2018). The monks’ citations of the esoteric ritual, whereby they spoke to me of the secret, thus performed an alteration in the kang-so’s transmissibility, a reorganization of the esoteric ritual’s interdiscursivities, towards enabling its ‘circulation’ amongst academic publics.

Keywords :

citation, performativity, semiotics of authorization, Nechung, Tibetan Buddhist ritual

Link to connect :

https://cnrs.zoom.us/j/92019215962?pwd=ZWdrVVNRZnJHZElSeWRCRjZOY2d6Zz09
ID de réunion : 920 1921 5962
Code secret : 6tgBbH

  • 17 octobre 2023

Groupe de lecture « Silverstein 2023 »,

Introduction : Getting – and Getting Across – the Message

  • 14 novembre 2023

Groupe de lecture « Silverstein 2023 »,

Lecture 1 : Text

  • 5 décembre 2023* (séance prolongée jusqu’à 18h30)

Intervenor : Luke Fleming (Université de Montréal)

Discussing : Bertrand Masquelier (Lacito) & Félix Danos (ICAR)

Theme : “On subalternating sounds:Click consonants, paralinguistic projection and the 19th century raciolinguistic imaginary”

  • 16 janvier 2024

Groupe de lecture « Silverstein 2023 »,

Lecture 2 : Event

  • 6 février 2024 (séance en anglais)

Intervenor : Félix Danos (ICAR)

Discussing : Constantine Nakassis (University of Chicago)

Theme : Perdu à/dans la traduction: re-examining Sapir-Whorf through translating Michael Silverstein to French

  • 19 mars 2024

Groupe de lecture « Silverstein 2023 »,

Lecture 3 : Context

  • 30 avril 2024 

Groupe de lecture « Silverstein 2023 »,

Lecture 4 : Chapitre 5

    • 14 mai 2024* (séance prolongée jusqu’à 18h30 ; séance en anglais)
      Intervenor : Judith T. Irvine (University of Michigan, Ann-Arbor, professeur émérite)
      Discussing : Mariem Guellouz (Université Paris Descartes) & Salomé Molina Torres (Doctorante en
      Sciences du langage, au CLESTHIA et LACITO, Université Sorbonne Nouvelle)
      Theme : A définir
  • Mardi 4 juin 2024, Journée d’Étude internationale, de 09h00 à 17h00 :

LACITO, en hybride, au Campus Nation Sorbonne Nouvelle université, 8 avenue de Saint-Mandé, 75012 Paris. Accueil de 08h à 19h, salle B015.

Program

 

 « CRYPTOTYPES : EPISTEMOLOGIE ET ETHIQUE DANS L’ETUDE DU FAIT LINGUISTIQUE TOTAL » 
banner Cryptotypes

Modérateurs :
Urmila Nair (LACITO) et Félix Danos (ICAR)

9h15 – 9h30

Ouverture de la journée : Petite histoire de l’anthropologie linguistique au LACITO
Isabelle Leblic (CNRS, Lacito)

9h30 – 9h45

Le contexte actuel de l’anthropologie linguistique en France
Caroline Bodolec (CNRS, CCJ, Directrice adjointe scientifique à l’InSHS CNRS)

9h45 – 10h00

Remarques préliminaires : sur le « cryptotype » et « le fait linguistique total »
Urmila Nair (Lacito)

 

10h00 – 10h15 : Pause café

 

10h15 – 12h15

Panel I : Le secret et le silence, le sous-jacent et le sous-entendu

Intervenante : Valentina Vapnarsky (CNRS, EPHE, Lesc)
Thème : Croix Parlantes : stratégies énonciatives du secret et de la révélation chez les Mayas

Intervenant : Julien Bonhomme (EHESS, Las)
Thème : Trahir le secret. Enjeux éthiques et épistémologiques.

Intervenante : Camille Riverti (CNRS)
Thème : Dire et taire la violence de la stérilisation dans les Andes péruviennes. Vers une théorie anthropologique du dicible

Discutant : Luke Fleming (Université de Montréal)

12h15 – 13h45 : Pause déjeuner

13h45 – 15h45

Panel II : Mouvements profonds, passés et présents, façonnant l’anthropologie linguistique en France

Intervenante : Cécile Leguy (Université Sorbonne Nouvelle, Lacito)
Thème : L’influence de Geneviève Calame-Griaule sur l’anthropologie linguistique

Intervenante : Chloé Laplantine (CNRS, Histoire des Théories linguistiques)
Thème : Emile Benveniste, l’ethnolinguistique entre Europe et Amérique

Intervenant : Vincent Hirtzel (CNRS, Lesc)
Thème : L’anthropologie du langage aujourd’hui : études de la langue yurakaré dans un environnement conditionné par les humanités numériques.

Discutante : Janet Connor (Université de Leiden)

 

15h45 – 16h00 : Pause café

 

16h00 – 17h00

Table ronde : Vers une anthropologie du langage 

Modérateur : Félix Danos (ICAR)

Cécile Canut (Cerlis), Bertrand Masquelier (Lacito), Aurore Monod-Becquelin (CNRS, Lesc) &

Janet Connor (ULeiden), Luke Fleming (UMontréal), John Leavitt (UMontréal)

Pour les inscriptions et autres modalités voir le site de la journée du 04 juin 2024 : https://cryptotypes.sciencesconf.org/

Organisateurs : Urmila Nair et Félix Danos avec Bertrand Masquelier et Isabelle Leblic

Cette journée précède la journée du 5 juin 2024 « Terrains de l’interlocution, interlocutions de terrain » (voir le programme interlocutions.sciencesconf.org).

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Évènements à venir

Jun
4
Tue
9 h 30 min Journée d’étude internationale │...
Journée d’étude internationale │...
Jun 4 @ 9 h 30 min – 17 h 00 min
Journée d'étude internationale │ « CRYPTOTYPES : EPISTEMOLOGIE ET ETHIQUE DANS L’ETUDE DU FAIT LINGUISTIQUE TOTAL »
« CRYPTOTYPES : EPISTEMOLOGIE ET ETHIQUE DANS L’ETUDE DU FAIT LINGUISTIQUE TOTAL »   Journée d’Étude internationale :  au Campus Nation de Sorbonne Nouvelle université, 8 avenue de Saint-Mandé, 75012 Paris & en hybride  [...]
Jun
5
Wed
9 h 30 min Journée d’étude internationale │...
Journée d’étude internationale │...
Jun 5 @ 9 h 30 min – 16 h 30 min
Journée d’étude internationale │ « CRYPTOTYPES :  Terrains, interactions, réflexivités. Les dessous des pratiques langagières Au coeur de l’interaction : une posture réflexive »
« TERRAINS DE L’INTERLOCUTION, INTERLOCUTIONS DE TERRAIN »   Journée d’étude du 5 juin 2024 – LACITO – CREDA,  au Campus Nation Sorbonne Nouvelle université, 8 avenue de Saint-Mandé, 75012 Paris & en hybride    [...]

Exposés passés

Programme 2022-2023 : La recherche en acte. Études de cas critiques autour d’une anthropologie sociale de la parole.

Durant l’année 2022-2023, Isabelle Leblic et Bertrand Masquelier, co-responsables du séminaire « Jeux de langage », ont choisi de donner une carte blanche à cinq « jeunes » chercheur·es (Laure Carbonnel, Félix Danos, Nathaniel Gernez, Urmila Nair et Camille Riverti), dont quatre sont membres associés au Lacito. Ils nous ont proposé la thématique suivante :

La recherche en acte. Études de cas critiques autour d’une anthropologie sociale de la parole.

Ils en sont donc les organisateurs. Cela fait suite à la séance de l’automne 2022 (première séance de cette année universitaire) où nous avons écouter Simon Levesque, sur l’invitation de Félix Danos.

Les séances se sont déroulées toutes à distance, sur zoom, à partir de 14 h. Un lien a été diffusé pour chacune d’entre elle.

La première séance est celle qui a eu lieu le mardi 25 octobre 2022 de 14h à 16H30 (voir ci-dessous exposés passés)

Les autres séances ont été les suivantes :

Mardi 25 avril 2023 à 14h en distanciel

https://cnrs.zoom.us/j/94990970177?pwd=UWZGNFg1amY1MXRoYjJKNUZIZzYwZz09

Nathaniel Gernez (LACITO) 

Registres swahilis et précontextualisation lors des prières du soir d’une famille Quaker à Bungoma, Kenya (voir ci-dessous exposés passés)

A partir d’avril et mai 2023. 

Felix Danos (Postdoctorant, ICAR CNRS Ens-Lyon)

« Y a ‘r’ », reflexivité sociophonétique de locuteurs stigmatisés : explorations en milieu rural et dans des chansons de rap français

Partant d’un travail d’anthropologie linguistique et sémiotique dans le Sud-Est de l’Allier, je m’interrogerai sur la signification sociale de deux types de réalisations du phonème /r/, identifiées par des locutrices : le /r/ dit “roulé” (prononciation apicale) et le /r/ non-marqué (prononciation vélaire). Déplaçant la focale vers un travail en cours portant sur les pratiques langagières dans le et autour du rap français contemporain dans les médias de masse, je m’intéresserai à des exemples d’occurrence de cette opposition entre prononciations du /r/ comme signe de réflexivité et de positionnements sociaux des locuteurs en tant que site de production idéologique (Irvine & Gal, 2019) en France métropolitaine, impliquant la mise en dialogue de voix hétérogènes et discordantes et impliquant, en creux, l’émergence d’un F/français non-marqué, ni socialement, ni linguistiquement.

Irvine Judith T. et Susan Gall, 2019. Signs of difference. Language and Ideology in Social Life, Cambridge University Press.

 

Urmila Nair (Lacito)

 

La sémiotique du « secret » – étude d’un rituel ésotérique tibétain bouddhiste

Cet article porte sur une analyse sémiotique du « secret » (gsang ba). J’examine un rituel bouddhique tibétain, exécuté dans le monastère de Nechung par ses moines, en exil dans les contreforts de l’Himalaya indien. J’analyse les matérialités dans lesquelles le rituel ésotérique est caché, sous les yeux de non-initiés. En effet, le secret est caché dans le corps, la parole et l’esprit du moine de Nechung, se fondant sur la notion de karma. Cette étude, ainsi, nous permet de considérer la relation entre les ontologies karmique et peircienne dans la sémiotique du « secret ».

This article presents a semiotic analysis of the “secret” (gsang ba) of a Tibetan Buddhist ritual, performed at Nechung monastery by its monks, in exile in the foothills of the Indian Himalayas. I analyze the materialities within which the esoteric ritual is hidden, in plain sight of the uninitiated. Ultimately, the secret is hidden in the body, speech, and mind of the Nechung monk, rooted in karma. The study, thus, permits us to consider the relationship between karmic and Peircean ontologies within the semiotics of the secret.

 

Camille Riverti (terrain en cours) Lacito

Dire et taire la stérilisation forcée dans les Andes (Pérou). Silences, insultes, médisances.

Discussion finale en juin

Mardi 25 avril 2023 de 14h à 16h30 - Exposé de Nathaniel Gernez (LACITO) : Registres swahilis et précontextualisation lors des prières du soir d’une famille Quaker à Bungoma, Kenya

Résumé

Si la « Société des Amis » fondée en Angleterre par George Fox, s’est principalement épanouit aux Etats-Unis, elle a également essaimer en Afrique au début du XXe siècle, par l’entremise de missionnaires, principalement au Kenya et plus spécifiquement dans le district de Bungoma (Rasmussen 1995, Thomas 2000). Parmi les pratiques d’une famille Quaker de cette région du Kenya, les prières du soir sont des moments importants de regroupement familiale au cours duquel sont réaffirmées les valeurs morales de la famille. Cette réunion quotidienne qui prend place dans le salon, n’est pas sans rappeler les travaux d’Ochs et Taylors (1992) sur le repas de famille. Les discours échangés autour des citations bibliques permettent de « précontextualiser » (Ochs, 1992) les épreuves que rencontreront les plus jeunes dans leurs vies et d’évaluer les comportements possibles. A l’occasion de ces moments de parole, différents registres (Agha 2005 ; 2007) du swahili se côtoient : le registre de la traduction biblique -très littéraire-, le registre courant des échanges quotidien et un registre plus soutenu, proche du standard, mobilisé par certains membres de la famille lors des sermons. L’usage de ce registre, qui tranche avec les pratiques quotidiennes, interroge sur les idéologies langagières du swahili dans cette famille et son rapport avec l’idéologie langagière spécifique des Quakers sur le « plain speech » (Bauman, 1983).

Agha Asif, 1999. 2005. Voice, Footing, Enregisterment, Journal of Linguistic Anthropology 15 (1), pp. 38‑59.

Bauman Richard, 1983. Let Your Words Be Few: Symbolism of Speaking and Silence among Seventeenth-Century Quakers, New York, Cambridge University Press, Cambridge Studies in Oral and Literate Culture 8.

Ochs Elinor, 1992. Indexing Gender, in Alessandro Duranti et Charles Goodwin (eds), Rethinking Context: Language as an Interactive Phenomenon, Cambridge, Cambridge University Press, pp. 335‑359.

Ochs Elinor et Carolyn Taylor, 1992. Family Narrative as Political Activity, Discourse and Society 3 (3), pp. 301-340

Rasmussen Ane M. B., 1995. A History of the Quaker Movement in Africa, London, British Academic Press.

Thomas Samuel S., 2000. Transforming the Gospel of Domesticity: Luhya Girls and the Friends Africa Mission, 1917–1926, African Studies Review 43 (2), pp. 1-27.

 

Mardi 07 février 2023 de 14h à 16h30 - Exposé de Laure Carbonnel (LACITO, MIASA, University of Ghana) : Les interjections dans les rassemblements festifs et la production de formes de vie. Une étude de Sound system à Accra (Ghana)

Résumé

Dans la ville d’Accra au Ghana, décrite comme un « hub où des habitants de différents pays peuvent inventer de nouvelles formes de cohabitations » (Van Wolputte et al., 2022), également réputée pour sa vie festive et nocturne, des DJ participent à poser ici et là une ambiance attendue et partagée et à créer des mouvements d’ensemble en choisissant des musiques, effets et transitions appropriés. Mais les danseurs ne suivent pas seulement le rythme musical. En effet, sur la piste de danse les interactions verbales ne sont pas rares, en particulier des interjections accompagnées de gestes lancés au DJ ou à certains danseurs.

Le sens et le style des interjections exclamatives, tel « He !! » repose largement sur l’intonation, ainsi que sur la situation qu’elles commentent dans le même temps. Dans quelles mesures participent-elles à la production de formes de vie partagée ? Bien qu’elles restent une énigme, elles sont fréquemment citées par Wittgenstein lorsqu’il explore les jeux de langage et formes de vie (Gorlée, 2015 : 77, 80). Au-delà de l’expression d’émotions, leur rôle dans la structuration des discours en situation a bien été étudié (Świątkowska, 2020 ; Kleiber, 2006). Je m’interrogerai ici sur leur capacité à structurer l’espace musical et dansé. À partir d’analyses vidéo des interactions verbales, des gestes et des mouvements dansés au sein de Sound System à Accra, je proposerai une analyse du sens de ces non-sens émis par les participants, ainsi que le rôle que ces expressions langagières et gestuelles dans la structuration des événements et des relations entre participants.

Gorlée Dinda L., 2015. « From words and sentences to interjections: The anatomy of exclamations in Peirce and Wittgenstein », Semiotica 205, pp. 37-86.
Kleiber Georges, 2006. « Sémiotique de l’interjection », Langages 161, pp. 10-23 (https://www.cairn.info/revue-langages-2006-1-page-10.htm?try_download=1).
Marrou Élise, 2019. « Dramatique des jeux de langage », A contrario 1 (28), pp. 39-55.
Świątkowska Marcela, 2020. « L’interjection », Encyclopédie grammaticale du Français, en ligne : http://encyclogram.fr.

Mardi 25 octobre 2022 de 14h à 16h30 - Exposé de Simon LEVESQUE (UQUAM, Montréal) : Littérature et anthropologie, C. S. Peirce et l’indexicalité.

Ce séminaire a été organisé grâce à l’initiative de (et avec la coopération de) Félix Danos, postdoctorant ICAR (ENS Lyon, CNRS), chercheur associé au Cerlis.

Résumé

Après avoir introduit largement les rapports entre littérature et anthropologie, Simon Levesque se concentrera sur la notion d’indexicalité telle qu’on l’entend (un peu différemment) en sciences sociales et en études sémiotiques, ce qui le conduira à discuter d’un ou de plusieurs cas précis tirés de l’ethnographie (publiée dans la collection Terre humaine).

Programme 2021-2022

Module 1. Anthropologie linguistique et sociolinguistique (Nathaniel Gernez, discutant des deux séances de janvier 2022)

Nathaniel Gernez – Univ. de Bordeaux : Une anthropologie sociale et linguistique des pratiques plurilingues : registres et procédés de mise en échelle lors d’une interaction à Bungoma, Kenya

Félix Danos – Icar, Univ. de Lyon : Enquête en sociolinguistique dans le bourbonnais français

Module 2. Anthropologie linguistique et poétiques
2.1 Littératures orales et art verbal (par extension : « formes théâtrales et musicales »)

Katell Morand – MCF, Univ de Nanterre : la question du conflit et de la circulation régionale de chants de guerre en Ethiopie

Alice Fromonteil – Credo, Univ. D’Aix-Marseille : N’est pas rêveur qui veut. La mise en scène et en récit des rêves à ‘Uvea (Wallis, Polynésie occidentale).

2.2. Poétiques de la résistance

Laure Carbonnel – Institut Historique Allemand (Paris) : Enquête sur les divertissements bouffons au Mali

Samia Khichane – Post-doc, EHESS : Les voix/voies de l’injure dans le mouvement Hirak algérien

Module 3. Anthropologie linguistique : langage et altérité

Camille Riverti – ATER post doc EHESS Enquête d’anthropologie linguistique dans les Andes péruviennes

Urmila Nair – Membre affiliée au Lacito. Enquêtes sur les problématiques de la traduction en anthropologie linguistique

Discussion finale
Mardi 25 janvier 2021 à10h - Exposé de Félix Danoz (Icar, Univ. de Lyon) : « Le patois net et simple » : Qualia du parler, langue, temps et territoire dans le Sud-Est de l’Allier.

Résumé

Dans le Sud-Est du département de l’Allier, la plupart des personnes de plus de 70 ans ayant grandi à la campagne s’expriment entre eux en employant un registre généralement appelé simplement « le patois » par les habitants et habitantes, qu’ils ou elles en soient locuteurs ou non. Alors que peu de personnes déclarent parler le patois, quasiment tous les habitants et habitantes se sentent légitimes à parler du patois. Parmi les commentaires les plus fréquents sur le(s) mode(s) d’expression(s) qualifié(s) de patois, ceux associant une manière de parler à un lieu (généralement une commune) sont de loin les plus communs. Pourtant, les discours concernant la diversité des patois ne sauraient être compris sans prendre en compte la qualification des manières de parler selon des critères historiques ou développementaux, à forte dominante temporelle plutôt que spatiale. À leur tour, ces distinctions temporelles sont associées à des distinctions qualitatives ou de qualia (Gal, 2013) qui contribuent, dans le cadre idéologique d’un rapport normatif au langage, à qualifier subrepticement les différents territoires, induisant la légitimation de rapports de centre à périphérie à travers la qualification des manières de parler, elles-mêmes associées à des espaces territoriaux distincts, souvent parallèles aux frontières officielles. Partant de l’analyse de discours portant sur les manières de parler (patois/français), je montrerai comment les catégories territoriales sont perpétuellement remises en jeu, amenant à leur association à des époques et temporalités contrastives, et en définitive à la (dis)qualifications de différentes manières de parler.”

Mardi 11 janvier 2021 à10h - Exposé de Nathaniel Gernez (Univ. de Bordeaux) : Une anthropologie sociale et linguistique des pratiques plurilingues : registres et procédés de mise en échelle lors d’une interaction à Bungoma, Kenya

Résumé

Afin de présenter mes recherches en anthropologie sociale sur les pratiques plurilingues en Afrique de l’est, je proposerai l’analyse d’une interaction filmée se déroulant à Bungoma dans l’ouest Kenya. Il s’agit d’un moment d’échange entre trois femmes, de trois générations différentes (fille, mère, grand-mère), au moment de la préparation du repas du soir. Au cours de la discussion, une des participantes, enseignante en maternelle, raconte un évènement survenue dans la journée : la vérification surprise des diplômes et des documents officiels employés par les enseignants du district. Dans l’analyse de cette interaction je m’interrogerai sur la façon dont les intervenantes mobilisent leurs répertoires plurilingues. Cela me permettra de proposer une réflexion sur le concept de registre (Agha, 1999 ; 2005 ; 2007) – sa pertinence dans l’analyse des pratiques plurilingues au Kenya – et de scale (Blommaert, 2007 ; Lempert & Carr, 2016 ; Gal & Irvine, 2019) afin de mettre en lumière les différents procédés de mise en échelle du vécu et des relations entre les participantes de l’interaction.

Mardi 12 mai 2020 Exposé de Manon Him-Aquilli (post-doctorante / ATER à Nanterre) sur Terrain en France ; anthropologie linguistique, analyse du discours et sociolinguistique politique
Mardi 21 avril 2020 Exposé de Suzanne Gruca (doctorante, Cerlis, Paris 5) sur Terrain en Argentine ; pratiques musicales
Mardi 24 mars 2020 Exposé de Nathaniel Gernez (chercheur au LESC et chargé de cours à Bordeaux) sur S'accomplir dans l'incertitude : activités et pratiques langagières de jeunes conducteurs de taxi-moto

Résumé

Au village de Wenda, dans la région d’Iringa en Tanzanie, des jeunes conducteurs de taxi-moto attendent les clients. Face à eux un instituteur de l’école primaire les interroge sur leur quotidien, ses difficultés et ses incertitudes concernant le nombre de clients, l’argent gagné, les dépenses occasionnées, l’argent qu’il faut remettre au propriétaire de la moto, le réservoir d’essence à remplir. Ce faisant, il cherche à les faire réfléchir sur leur situation et les incite à choisir plutôt une activité agricole, en tant que travailleur journalier. L’analyse des pratiques langagières des jeunes conducteurs de taxi-moto révèle quelques innovations linguistique en kihehe pour exprimer leur rapport à l’argent. Il s’agit principalement de verbes qui renvoient à des gestes : « arracher », « gratter », « jeter ». Ces verbes qui décrivent une action brusque tranchent avec une forte euphémisation de l’argent. Ils nous interroge sur ce que ces jeunes souhaitent exprimer par ces innovations. S’agit-il d’accorder à leur travail la même noblesse que celui des champs où les activités principales sont défricher, labourer, semer ? Ou est-ce que ce rapport non-pacifié à l’argent est à mettre en lien avec des figures plus anciennes de l’accomplissement des jeunes hommes : la figure du guerrier et du chasseur. Ces questionnements se veulent une introduction à la question de l’incertitude. L’incertitude qui est au cœur du quotidien de ces jeunes est-elle uniquement subies ? Participe-t-elle d’une stratégie d’accomplissement de soi ? Après tout l’incertitude peut également être envisagée sous un aspect positif : à chaque instant il est possible de faire « un gros coup », transporter un client qui laissera un pourboire ou qui demandera à être transporté loin pour une grosse somme.

25 février 2020 Exposé d'Alice Fromonteil (Credo, Marseille) sur Les tagi, lamentations poétiques des élucidations. Chanter la chute des récits à 'Uvea (Wallis, Polynésie occidentale)

Résumé
À ‘Uvea, certains récits s’achèvent par des poésies chantées nommées tagi. Cette pratique crée et délimite une forme de jeux de langage génératrice et tributaire de ses propres règles. Contribuant à la socialisation langagière, la transmission des récits oraux commence par l’apprentissage des tagi. Ces interludes versifiés constituent une mise en abyme mnémotechnique des récits dont ils concentrent la trame narrative. Situés entre le climax et le dénouement de l’intrigue, ils correspondent à une poétique des élucidations qui sont et font la chute des récits. Leur énonciation repose sur un système phonique, rythmique et mélodique composé de rimes et d’assonances. Aussi structurée et normée soit-elle, cette pratique autorise une marge de liberté et de créativité qui donne lieu à des improvisations et à des variations. Vécus comme une expérience esthétique, les tagi font l’objet d’une théâtralisation qui se manifeste par des modulations vocales et des expressions langagières spécifiques. Le narrateur les entonne a capella, accompagné parfois par l’auditoire qui chante en polyphonie, à l’unisson ou en contrepoint. La signification des tagi est parfois vague et imprécise, à tel point qu’il est difficile de les comprendre entièrement, et donc de les traduire. Narrateur et auditoire jouent alors ensemble avec le langage et sa diction, entre le sens et les sons. Par une analyse des ressources linguistiques et gestuelles déployées par les participants, cette présentation explorera la façon dont ces jeux de langage sont élaborés en situation par rapport à l’ensemble du récit dans lequel ils s’inscrivent et aux modalités d’interaction particulières qu’ils impliquent.

21 janvier 2020 Lectures de textes et discussion (Cette séance aura lieu ultérieurement, à cause des grèves)

Le séminaire sera dédié aux étudiants de master et doctorants de l’Inalco /Lacito.
Il est organisé autour de trois lectures (articles et leur discussion). La discussion sera introduite par un rappel (exposé de 30 mn) du champ de l’anthropologie linguistique (versions française et nord-américaine). Les textes proposés à discussion sont :
— Siran Jean-Louis, Les énoncés ne sont pas des choses, mais des événements. Journal des anthropologues, 1994.
— Masquelier Bertrand, Anthropologie sociale et analyse du discours, Langage et société, 2005.
— Sherzer Joël, Langage et culture, une approche centrée sur le discours, Langage et Société, 2012 (version française).

10 décembre 2019, annulé pour cause de grèves Présentation/discussion animée par Marieke Blondet et Mickaële Lantin-Mallet

10 décembre 2019, annulé pour cause de grèves
Présentation/discussion animée par Marieke Blondet et Mickaële Lantin-Mallet autour de l’ouvrage qu’elles ont dirigé “Anthropologies réflexives, modes de connaissance et formes d’expérience“, PUL, 2017.
Cette séance permettra d’ouvrir le séminaire aux problématiques de l’anthropologie réflexive et des pratiques de terrain.

16 mai 2019, dans le cadre d'un sémaire commun "Terrain, analyse et comparaison des langues (TACOL)" / "Jeux de Langage"

Exposé de Darja Hoenigman (ANU), sur The significance of the incomprehensible in Awiakay and Meakambut songs
Résumé en anglais :
The Awiakay people of East Sepik Province in Papua New Guinea closely identify themselves with a cycle of 42 songs, called Kaunjambi. While much of this cycle is composed in a non-translatable spirit language, the abundance of parallelisms uncovers what the words keep hidden.
Parallelism is an ordered interplay between repetition and variation, in which the non-repeated elements or variables are associated on the basis of similarity. The logic of these associations is opaque if we look only at the physical or most literal senses of the words/phrases compared. They carry symbolic implications which are ‘infused by cultural assumptions’ (in the sense used by Roger Keesing 1979), and can only be understood in reference to other aspects of Awiakay lifeworld.
In this talk, accompanied by subtitled video segments, we will explore various forms of parallelism used in Kaunjambi, and compare them with the ones in Meakambut songs.
Rérérence :
— Keesing, Roger M. 1979. Linguistic Knowledge and Cultural Knowledge: Some Doubts and Speculations. In: American Anthropologist. Vol. 81:1, pp. 14–36.

9 avril 2019 Exposé de Kristin Vold Lexander (MultiLing Université d'Oslo) sur Jeux de langage et jeux de média dans un cadre familial plurilingue

Résumé :
Dans l’ère de « polymedia » (Madianou et Miller 2012), une partie grandissante des populations du monde a accès à des moyens de communication qui facilitent un contact fréquent malgré les distances géographiques. Des applications comme Snapchat, WhatsApp et Facebook messenger permettent d’envoyer des messages écrits, des messages vocaliques, des photos et des vidéos, et de faire des appels sans ou avec vidéo. Dans cet environnement de possibilités d’action (affordances, Hutchby 2001), le choix même d’outil de communication peut avoir une signification sociale ou émotionnelle, car il n’est plus dirigé par des questions d’accès ou d’économie (Madianou et Miller 2012). Ce choix peut également avoir des répercussions linguistiques, par exemple quand le choix de modalité mène vers des choix linguistiques spécifiques, et la communication digitale entraine de nouveaux « jeux de langage ». L’écriture plurilingue est acceptée, des graphies non-conventionnelles sont normalisées dans certaines situations informelles, et la communication devient de plus en plus multimodale. Un tel contexte est favorable à l’expérimentation avec des normes linguistiques et des langues. Ainsi, pour les migrants, non seulement les échanges avec les membres de famille restés au pays d’origine peuvent être intensifiés, mais aussi, la communication digitale constitue un espace important pour le contact avec les langues d’héritage, notamment pour les enfants émigrés. En analysant des données interactionnelles digitales (de WhatsApp, de Facebook Messenger et des SMS) et des données ethnographiques collectées auprès de quatre familles sénégalaises vivant en Norvège, je discute dans cette présentation les rapports entre choix de langues, choix de média et de modalité et rapports familiaux (cf. Diop 1985). Quelles sont les normes qui se construisent dans l’interaction digitale avec les membres de famille dans le pays d’origine ? Quelles sont par exemple les pratiques linguistiques digitales que l’on peut identifier entre grands-parents et petits-enfants, entre tantes/oncles et neveux/nièces ? Quelles sont les effets des choix de modalité et d’outil sur les « jeux de langage » dans les familles migrantes ?

4 avril 2019, dans le cadre d'un sémaire commun "Jeux de Langage" / "Terrain, analyse et comparaison des langues (TACOL)" Exposé de Nancy Hawker (Oxford University) sur Only joking? The pragmatics of multilingual humour in Palestinian and Israeli political discourse

Résumé en anglais :
The problem that will be tackled through Only joking is the reconciliation of the ethnographic collection of speech data with the pragmatics-based discourse analysis of isolated samples. Where does the emic perspective of the speakers end and where does the researcher’s etic framing start? Seminar participants will have the chance to read and interpret a few examples of recognisable genres of humour, such as face-threatening jokes (Haugh 2016), self-deprecating jests (Schnurr & Holmes 2009) and parody (Bakhtin 1994; Hawker 2018). The samples were recorded during the researcher’s fieldwork on the 2015 Israeli election campaigns, or extracted from archival records. Humour has been put to use for forming, maintaining, and disrupting interpersonal relations (Meyer 2000), in this case with repercussions for the inclusion or exclusion of Palestinian politicians from the Israeli political class. Sometimes, the humourous intent failed, and this revealed the complexity and fragility of humorous interaction especially in a fraught context (Bell 2015). The evidence, analysis and argument are taken from the forthcoming book The Politics of Palestinian Multilingualism: Speaking for citizenship — however, that book is not at all humorous!
The polyvalent social effects of humour are brought together in this seminar in order to highlight, ultimately, one point: Though the speakers are caught between two ideologies of monolingualism following parallel and conflictual one-nation-one-language equations, the multilingual practices that they express within multiple discursive constraints and consequences will continue for as long as they are pragmatically useful. The rhetorical attractiveness of humour in particular (“The problem with political jokes is they get elected!“) means that ideologies hold power over explicit attitudes, but not so much over tacitly understood practices. If the seminar can confirm that the pragmatic purposes are identifiable beyond the immediate instances of the speakers’ tacit intent and/or the interlocutors’ laughter, then the evidence from the practices can go beyond enriching the description of discursive patterns towards intervening for the re-evaluation of multilingualism in the double-monolingual context. The empirical counterpoint challenges the policies of Hebrew hegemony and Arabic containment — but is does this researcher’s framing overstep the ethnographic evidential base?
Références :
— Bakhtin, Mikhail. 1994 (1929-1975) The Bakhtin Reader: Selected Writings of Bakhtin, Medvedev, and Voloshinov ed. and trans. by Pam Morris (London: E. Arnold).
— Bell, Nancy. 2015. We are not amused: Failed humor in interaction. (Berlin: de Gruyter Mouton).
— Haugh, Michael. 2016. “Just kidding”: Teasing and claims to non-serious intent. Journal of Pragmatics 95: 120-136.
— Hawker, Nancy. 2019 (forthcoming). The Politics of Palestinian Multilingualism: Speaking for citizenship. (London/New York: Routledge).
— Hawker, Nancy. 2018. Arabic borrowing of the Hebrew word menahēl ‘manager’: Articulations and ideologies. In Stefano Manfredi & Mauro Tosco (eds), Arabic in contact. (Amsterdam: John Benjamins) pp. 332-347.
— Meyer, John C. 2000. Humor as a double-edged sword: Four functions of humor in communication. Communication theory 10.3: 310-331.
— Schnurr, Stephanie, and Janet Holmes. 2009. Using humor to do masculinity at work. In Humor in Interaction ed. by Norrick, Neil R., and Delia Chiaro (Amsterdam/Philadelphia: John Benjamins) pp.101-123.

12 mars 2019 Exposé de Paulette Roulon-Doko (LLacan) sur Des couleurs mais pas 'la couleur', le cas du gbaya (langue oubanguienne d'Afrique centrale)

Résumé :
Je montrerai à partir de l’emploi en situation des ‘couleurs’ en gbaya que la langue ne distingue lexicalement pas la couleur de l’aspect visuel qui prend en compte de très nombreux paramètres. J’analyserai ensuite avec attention le rôle joué par les verbes et les adjectifs dans l’appréhension de l’aspect visuel ainsi que leurs spécificités dans cette langue. Enfin, je montrerai que les locuteurs peuvent aussi avoir recours à des éléments types auxquels ils réfèrent pour désigner une couleur, comme l’orange en français par exemple. Donc je montrerai qu’on peut parler de couleurs sans appréhender la couleur comme une entité à part.

12 février 2019 Exposé de Pierre Diarra (Paris 3) sur Quand le langage ordinaire introduit à la philosophie

Résumé :
Les proverbes sont-ils des « jeux de langage » ? Cherchent-ils à former ou à informer ? Recourir au proverbe, est-ce une manière de signifier que le langage, en particulier le langage philosophique comme Wittgenstein semble le suggérer, ne fonctionne pas toujours d’une manière unique ? Tout philosophe et peut-être tout locuteur emprunte, parfois inconsciemment, au langage quotidien ses certitudes, ses évidences et ses structures de pensée. Tendre vers la «bonne philosophie » consisterait à élaborer une pensée dans un langage et dans un « jeu » de langage, en restant dans le langage quotidien.
     Si les proverbes africains invitent à établir des rapports, à dévoiler un logos au-delà de ce qui est dit, ils introduisent surtout une forme de pensée philosophique. « Parler en proverbes », c’est ouvrir des perspectives de recherche, de débat ou même « faire des enquêtes » sur la manière dont les locuteurs élaborent leur pensée à partir du quotidien. Quand je dis, par exemple, « le cochon ne se fatigue pas de (porter) sa tête », j’introduis dans le discours une invitation à observer le cochon d’une certaine manière, à établir des rapports avec le reste du discours, sans oublier le contexte de l’énonciation et la confusion qui peut se glisser entre des « jeux de langages » différents.
     Après avoir essayé de préciser ce que Wittgenstein entend par « jeux de langage », nous ferons un rapprochement avec les proverbes. Nous verrons alors comment ceux-ci dévoilent tout un monde et une manière de penser, d’élaborer des rapports. Il sera alors possible de préciser le cheminement philosophique que l’on peut découvrir à partir d’une analyse de quelques proverbes.
Quelques textes pour élargir la problématique
– Pierre Diarra, Proverbe et Philosophie. Essai sur la pensée des Bwa du Mali, Paris, Karthala, 2002
– Pierre Diarra, « Le proverbe africain en contexte interculturel : une incompréhension systématique », dans Marie-Dominique Popelard (éd.), Moments d’incompréhension. Une approche pragmatique, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2007, p. 17-30.
– Pierre Diarra, « Les proverbes au cœur de la sagesse et de l’esthétique africaines », dans Michel Kouam et Christian Mofor, Philosophies et cultures africaines à l’heure de l’interculturalité. Anthologie, tome 2, Paris, L’Harmattan, 2011, p. 131-154.
– Pierre Diarra et Cécile Leguy, Le proverbe au risque de l’incompréhension, dans Micheline Lebarbier (éd.), Les ruses de la parole. Dire et sous-entendre. Parler, chanter, écrire, Paris, Karthala, 2017, p. 23-47.

11 décembre 2018 Isabelle Leblic (Lacito-Cnrs) et Bertrand Masquelier (Lacito), Que nous disent les anthropologues (linguistes ou non) quand ils se réfèrent à leur lecture de Wittgenstein ?

Cette séance est consacrée à une discussion autour de quelques textes d’anthropologues (linguistes ou non) qui argumentent, explicitement ou implicitement, à partir de leur lecture de Wittgenstein. L’objectif est de prolonger les discussions ouvertes lors des deux précédents séminaires (octobre et novembre).
Bibliographie :
— Affergan Francis, 2007, « L’anthropologie cognitive existe-t-elle ? », L’Homme, n° 184, pp. 85-105. [Accessible via jstor]— Basin Jean, 1998, « Questions de sens », Enquêtes, n° 6, pp. 13-34. [Accessible via revue.org]— Bazin Jean, 1999, « Sciences des mœurs et description de l’action », Le Genre humain, 1999/2, n° 5, pp. 33-58. [Accessible via Cairn)
— Duranti Alessandro, 1997, Linguistic Anthropology, Cambridge University Press. [En particulier, pages 236-243]

13 novembre 2018 Exposé de Nathaniel Gernez (post-doc Fyssen, African Studies Center, Leiden University) sur Se raconter autour d'un verre d'alcool de maïs: jeux de langage et plurilinguisme dans la région d'Iringa en Tanzanie.

Résumé :
     La Tanzanie est un pays d’une grande diversité linguistique qui a forgé son unité nationale sur la promotion et l’idéologisation d’une langue, le kiswahili. Ce succès indéniable contribue toutefois à un phénomène d’effacement (Irvine et Gal, 2000) des langues locales (il en existe plus de 120 langues) et des pratiques plurilingues entre la langue locale, le kiswahili et plus rarement l’anglais.
     Nous appuyant sur une approche ethnographique des situations d’interlocution et des pratiques plurilingues, nous présenterons l’analyse d’une interaction filmée au village de Wenda, dans la région d’Iringa. Située à bonne distance de la côte, sur les hautes terres du sud du pays, cette région abrite une population les Hehe, dont la langue le kihehe est bien distinct du kiswahili tout en appartenant au même phylum Bantu. Dans un bar d’alcool artisanal de ce village, le propriétaire du bar, Mahavile (environ 70 ans), livre un récit de vie qui porte plus particulièrement sur sa carrière militaire. Autour de lui, d’autres anciens du village sont présents, de même que deux femmes, dont l’une, sa seconde épouse, sert l’alcool. L’analyse de cette interaction sera l’occasion de montrer comment, par son usage du kiswahili et du kihehe, Mahavile relate son engagement pour la défense de la nation, tout en présentant son parcours dans l’armée comme une expérience localement partagée avec ses pairs. Les jeux de regard, les silences, les questions et les prises de parole des autres clients du bar, contribuent également à l’élaboration de ce récit qui se transforme peu à peu en un véritable échange.

16 octobre 2018 Présentation introductive de Bertrand Masquelier (Lacito) : Que peut apprendre un anthropologue linguiste de la lecture de Wittgenstein ?

Résumé :
Le « Wittgenstein » des anthropologues sociaux et des anthropologues linguistes : les raisons pour lesquelles certains anthropologues s’inspirent des recherches de Wittgenstein sur les « usages du langage » et les « formes de vie ». Le tournant pragmatiste en anthropologie sociale et linguistique : remarques à propos de Peirce, Malinowski et Wittgenstein.

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