photo d'Alexis Michaud en 2015

Alexis MICHAUD  

Directeur de recherche

CV détaillé (en PDF)

 

Thèmes de recherche

Mes deux spécialités aréales sont, d’une part les langues du sous-groupe naish de la famille sino-tibétaine (le naxi, le na et le lazé), d’autre part les langues du groupe viétique de la famille austroasiatique. Au plan thématique, j’ai une spécialisation en phonétique/phonologie expérimentale, et m’intéresse en particulier aux tons et à la prosodie. Je suis également très intéressé par la linguistique historique.

Une de mes convictions est qu’il y a beaucoup à gagner à une bonne articulation entre documentation des langues et recherche. S’agissant de langues rares et en danger, l’importance du travail de documentation fondamentale ne saurait être surestimée. Une partie importante de mon activité est consacrée à cette problématique, qui trouve actuellement un contexte favorable dans le mouvement pour une Science ouverte.

Projets de recherche

Langues de la zone tibéto-birmane (opération de recherche au sein du LACITO)

• “La documentation computationnelle des langues à l’horizon 2025”, projet ANR franco-allemand coordonné par Gilles Adda (CNRS-LISN)

“LabField : amener le laboratoire sur le terrain”, opération de l’Axe 1 (Phonétique/phonologie) du Labex “Fondements empiriques de la linguistique”

Mots-clés

thèmes : phonétique – phonologie – typologie – phonologie panchronique – phonétique expérimentale – description linguistique – morpho-phonologie – tradition orale

langues : lazé – na/mosuo – naxi – sino-tibétain – vietnamien – austroasiatique

Corpus déposés dans la collection Pangloss

corpus naxicorpus nacorpus lazé

Choix de publications

— Fily, M., Wisniewski, G., Guillaume, S., Adda, G., & Michaud, A. (2024). Establishing degrees of closeness between audio recordings along different dimensions using large-scale cross-lingual models. arXiv preprint arXiv:2402.05581.
— 2018. Michaud, Alexis, Oliver Adams, Trevor Cohn, Graham Neubig & Séverine Guillaume. “Integrating automatic transcription into the language documentation workflow: experiments with Na data and the Persephone toolkit“. Language Documentation and Conservation 12. 393–429.
— 2018. Adams, Oliver, Trevor Cohn, Graham Neubig, Hilaria Cruz, Steven Bird & Alexis Michaud. 2018. “Evaluating phonemic transcription of low-resource tonal languages for language documentation“. Proceedings of LREC 2018 (Language Resources and Evaluation Conference), 3356–3365. Miyazaki.
— 2017, Tone in Yongning Na: lexical tones and morphotonology. Berlin: Language Science Press (Studies in Diversity Linguistics 13), 2017.- 573 p.
— 2015. Michaud, Alexis, Michel Ferlus & Minh-Châu Nguyễn. Strata of standardization: the Phong Nha dialect of Vietnamese (Quảng Bình Province) in historical perspectiveLinguistics of the Tibeto-Burman Area 38(1). 124–162.
— 2015. Michaud, Alexis & Jacqueline Vaissière. Tone and intonation: introductory notes and practical recommendationsKALIPHO – Kieler Arbeiten zur Linguistik und Phonetik 3. 43–80.
— 2015. Niebuhr, Oliver & Alexis Michaud. 2015. Speech data acquisition: the underestimated challengeKALIPHO – Kieler Arbeiten zur Linguistik und Phonetik 3. 1–42.
— 2011, Jacques Guillaume, Michaud Alexis, Approaching the historical phonology of three highly eroded Sino-Tibetan languages: Naxi, Na and LazeDiachronica 28(4) : 468-498.

Toutes les publications scientifiques (sur HAL)

Actualités

Vidéos en ligne, podcasts

2020, « À l’écoute des Na de Yongning », film documentaire au sujet du terrain en pays na, à Yongning. Version chinoise : 倾听 – 法国语言学家米可永宁摩梭语采风记录

— 2020, « Comment trouver le bon ton », film avec Pascal Boyeldieu, 13:00 mn, réalisation Franck Guillemain & Céline Ferlita (série “Langues vivantes / Langues vitales”). 

— 2019, « Faut-il sauver les langues en danger ? » (François Yvon et Alexis Michaud), Universcience – Cité des Sciences et de l’Industrie, décembre 2019. 26 minutes.

— 2019, « Vidéo sur le terrain : un projet conjoint de documentation linguistique et de film documentaire » (Franck Guillemain et Alexis Michaud), séminaire LACITO “Terrains, analyse et comparaison des langues”, March 2019. 84 minutes.

— 2014, « L’analyse des systèmes de tons », intervention à l’Ecole d’été LACITO “Méthodes en linguistique, des données empiriques aux hypothèses typologiques”, juillet 2014. 104 minutes.

[podcast] 2023, « Vox 14 : Unir informatique et linguistique », dialogue avec Guillaume Wisniewski, 22 mars 2023. Réalisation : Maxime Hébert, Labex “Fondements empiriques de la linguistique” (EFL). 43 minutes.

En anglais

2021: “FORGE 2021 Panel discussion: Mapping the Landscape – Research Data Management in the Humanities“.

— 2019, “Persephone: The benefits of interdisciplinary dialogue between computer scientists and fieldworkers”, atelier “Persephone: a tool for the automatic phonemic transcription of endangered languages”, SOAS World Languages Institute, Londres, November 2019. 38 minutes.

En chinois / 中文

— 2012, “Le chasseur de sons” / 路•音”, film documentaire sur la linguistique de terrain chez les Naxi, 2012. Tianjin Television 天津电视台. 24 minutes.

Images du terrain

Les deux rives du pays na (Yunnan, Chine)

Le territoire où habite actuellement le peuple na (aussi appelé naxi, moso) est divisé par une frontière naturelle, le fleuve Yangtsé. Au fil des siècles, les Na vivant sur l’une et l’autre rive ont connu une évolution culturelle divergente, les uns empruntant au Tibet voisin sa religion et d’autres traits culturels, les autres plus directement influencés par les dernières dynasties chinoises, Ming et Qing. La photographie a été prise en un point de la vallée du Yangtsé où ces deux univers culturels se font face. Le cliché est pris du village de /fv̩˥kʰo˧/ (Fengke en chinois), sur la rive droite du Yangtsé, rattaché à la préfecture de Lijiang (fortement sinisée). Les habitants soulignent qu’à /fv̩˥kʰo˧/ on pratique le mariage (la mariée rejoignant la maisonnée de son époux), à la différence des Na de l’autre rive, qui jusqu’à date récente ne pratiquaient pas le mariage (mais des visites des amants aux amantes, système peu courant, et célèbre parmi les ethnologues). Cette différence frappante, tenant à une coutume dont on imagine aisément les malentendus qu’elle génère, et qui est aujourd’hui devenue argument touristique, peut masquer certaines proximités qui au contraire passionnent le linguiste : le dialecte na de /fv̩˥kʰo˧/ est sur bien des points proche de celui qui est parlé sur la rive opposée, signe d’une origine commune doublée de contacts qui n’ont sans doute jamais été totalement interrompus.

© Alexis Michaud (CNRS-LACITO, 2004)

Lieu : Asie, Chine, Yunnan – Langues : na, naxi

La vallée de Xiangjiao (项脚), Sichuan, Chine

Les régions montagneuses enclavées abritent souvent une grande diversité linguistique, autant que botanique et zoologique. C’est vrai de l’Himalaya tout entier; c’est particulièrement vrai du comté de Muli, en Chine, à la frontière entre les provinces du Sichuan et du Yunnan. Ce comté est d’une extrême richesse au plan linguistique; ainsi, la langue lazé (langue tibéto-birmane) n’est parlée que dans quelques hameaux de la vallée de Xiangjiao (项脚). La photo est prise depuis une maison lazé ; dans les hameaux que l’on aperçoit de l’autre côté de la vallée, c’est une autre langue qui est parlée ! Situation qui n’a rien d’exceptionnel dans la région.
Les reliefs spectaculaires de la région rendent précieuse chaque parcelle de terre plane. Les habitations sont pour la plupart à flanc de coteau, le fond de la vallée étant tout entier occupé par les champs de céréales.

© Alexis Michaud (CNRS-LACITO, 2008)

Lieu : Asie, Chine, Sichuan, Xiangjiao – Langue : lazé

Cérémonie funèbre au village de FengKe 峰科 (Lijiang, Yunnan, Chine 中国 云南省丽江市)

Dans le temps, les funérailles des Naxi se faisaient par crémation. A l’heure actuelle, la coutume chinoise de l’inhumation a été adoptée. Le vocabulaire témoigne de ce changement: le mot pour “tombe” est un emprunt au chinois; en naxi, pour dire “tombe”, on dit simplement “défunt” (“cadavre”).
Mais de tout ça, on parle le moins possible, car il ne faut pas parler de malheur !
Sur la photo, on voit l’ascension d’un cortège funèbre vers le lieu où sera inhumé le défunt : un escarpement rocheux au-dessus du fleuve Yang-tsé (金沙江). En tête, les membres de la famille, la tête bandée de tissu blanc en signe de deuil.

© Alexis Michaud (CNRS-LACITO, 2004)

Lieu : Asie, Chine, Yunnan, Lijang, FengKe – Langue : na ou naxi

Le départ du chemin des caravanes, de Yongning (Yunnan) vers Yiji (Sichuan)

Aujourd’hui encore, un chemin pour mulets soigneusement entretenu relie le bourg de Yongning (Yunnan) aux villages d’altitude environnants, tels que Yiji, dans le comté voisin: Muli, de l’autre côté de la frontière administrative entre les provinces du Yunnan et du Sichuan. Pour le visiteur qui voit se côtoyer au centre de Yongning les poids lourds et les petites caravanes de chevaux, le transport à cheval paraît d’un autre âge. Pourtant, ce qui maintient vivant ce mode de transport n’est pas un attachement particulier à la tradition, mais bel et bien son efficacité : pour les destinations les plus enclavées, la grand’route est longue et tortueuse, et ne mène pas jusqu’à destination, tandis que le chemin des caravanes, au prix du franchissement des cols d’altitude, dessert les plus petits hameaux.

© Alexis Michaud (CNRS-LACITO, 2008)

Lieu : Asie, Chine, Yunnan, Yongning – Langue : na ou naxi

La tenue moderne d'un prêtre-chamane

Si télévisions et téléphones portables sont courants partout en Chine (pays qui compte le plus grand nombre d’utilisateurs de téléphones mobiles au monde), les appareils photos sont moins répandus dans les petits villages : tout-numériques, ils supposent de posséder aussi un ordinateur, éventuellement une imprimante, objets qui n’ont encore guère fait leur apparition dans les foyers ruraux du Sud-Ouest chinois. La venue d’un enquêteur muni d’un appareil photo fournit donc l’occasion de poser, et, pour les femmes, de revêtir le costume traditionnel. M. Hu, aux côtés de sa femme, a choisi de garder ses vêtements de tous les jours. Dernière personne du village à connaître les rituels de la tradition lazé, qu’il a appris au cours de son adolescence (et a accepté d’enregistrer), il ne se pare de ses attributs de prêtre-chamane qu’à l’occasion des cérémonies.
有城里的朋友来访问,是穿传统服饰拍照的好机会。但照片上的胡先生反倒选择了日常的衣服。因为他虽然有时充任水田人(拉热人,/la˧ze˧/)的巫师,可是与宗教相关的服饰配件不是随便用的,而是在进行宗教仪式中才能穿戴的。

© Alexis Michaud (CNRS-LACITO, printemps 2008)
Lieu : Asie, Chine, comté de Muli, vallée de Xiangjiao – Langue : lazé

Les montagnes du comté de Muli, en bordure du haut plateau tibétain

Les montagnes sont propices à la conservation d’une grande diversité linguistique, autant que botanique, zoologique… Le comté de Muli, à la frontière du Sichuan et du Yunnan, est l’une des régions les plus accidentées de Chine, et l’une des plus riches linguistiquement. Dans la vallée de Xiangjiao (photo) coexistent plusieurs groupes, dont quelques familles de locuteurs d’une langue qui a moins de 400 locuteurs en tout : le lazé. Aucune des quelques personnes lazé avec qui j’ai travaillé n’a connaissance de l’histoire de leur petit groupe; si enclavées soient-elles, les vallées himalayennes ne sont pas à l’abri des bouleversements historiques, et les dernières décennies ont vu la perte d’une bonne part des traditions orales. Il y a une trentaine d’années, lors de la visite d’ethnologues (GUO Dalie et HE Zhiwu), certains Lazé conservaient encore la mémoire de la migration qui avait amené leurs ancêtres, huit générations auparavant, dans la vallée qu’ils occupent actuellement.
En revanche, la langue lazé continue d’être parlée aujourd’hui. Les données recueillies en 2008 et 2009 ont permis de lever les doutes sur l’appartenance du lazé au groupe des langues naish ; dans l’étude de la phonologie historique de ce groupe de langues, le lazé apporte un témoignage important.

© Alexis Michaud (CNRS-LACITO, 2008)

Lieu : Asie, Chine, Yunnan/Sichuan, comté de Muli, vallée de Xiangjiao – Langue : lazé

Un des derniers connaisseurs de la langue na de Yongning : Mme Latami Dashilame

Dans sa jeunesse, mon professeur de langue moso (na) de Yongning, Mme Latami Dashilame, a été l’un des acteurs d’un documentaire-fiction au sujet des gens de Yongning et de leur structure familiale inhabituelle (Le mariage ‘A-zhu’ chez les Naxi de Yongning《永宁纳西族的阿注婚》). Plus tard, l’un de ses fils est devenu ethnologue, et de nombreux collègues ont rendu visite à sa mère. Elle a vu la culture des Na de Yongning devenir un objet de curiosité, et sa promotion dans l’industrie touristique, dont elle mesure les bons et les mauvais côtés. Ces expériences ont ébranlé certaines croyances que lui avaient transmises ses aînés, par exemple la foi bouddhiste. Elle pratique chaque jour les rituels, mais n’a plus entièrement foi dans la réincarnation. Les récits qu’elle a bien voulu enregistrer reflètent cet entre-deux : comment elle suspend sa croyance en un univers symbolique qui demeure néanmoins le sien.

Cliché @Qin Qing (秦晴), 2012 — texte ©Alexis Michaud (CNRS-Lacito, 2012)

Lieu : Asie, Chine, Yunnan, Yongning – Langue : na

Aller au contenu principal